Cette semaine le n°72 :
Luca Vannini
Interview de décembre 2015 pour le club Tex du Portugal
Luca, vous venez d'arriver à Tex, alors rien de mieux que de vous présenter au lecteur Texian :
Luca Vannini : Je suis né à Rome en 1961 il y a 54 ans.
Ayant obtenu mon diplôme au Iº Liceo Artistico della Capitale, je me suis porté volontaire dans l'armée, à l'école des officiers, dans les parachutistes, en route pour la guerre au Liban, mais j'ai vite compris que la carrière militaire n'était pas pour moi, malgré le salaire sûr et élevé de cette hauteur. Démobilisé comme lieutenant, j'ai trouvé un emploi de professeur de dessin dans une école privée à Rome et c'est lors d'une pause de travail que j'ai lu dans le quotidien Il Messaggero une annonce où ils cherchaient des dessinateurs (croquis et art final à peindre ) pour les bandes dessinées.
J'ai envoyé des dessins au crayon et quelques "ignobles" encrages. Je n'avait aucune compétence en bande dessinée, bien que je fus un lecteur discret dans ma jeunesse.
Je me souviens qu'à cette époque j'étais amoureux de Frigidaire, des histoires « acides » d'Andrea Pazienza et des chefs-d'œuvre de Tanino Liberatore avec son RanXerox.
Le fait est que quelques jours plus tard, j'ai reçu un appel du responsable d'un des studios de BD les plus importants de Rome à l'époque : le studio de Dino Leonetti. Dino était un décorateur de cinéma, il avait travaillé avec Gianni Polidori pour le casting de grandes productions en Italie et en Amérique et était un ami de Sergio Amidei, écrivain et scénariste.
Il s'était engagé dans un studio de bande dessinée pour combler les lacunes que le cinéma en crise avait créé. Leonetti a idéalisé Maghella pour le magazine satirique Menelik, une héroïne de bandes dessinées érotiques italiennes, peut-être la première du genre. Plus tard, il cède les droits d'édition à Ediperiodici de Barbieri et Cavedon, des entrepreneurs courageux qui font face à la censure féroce de ces années, publiant plusieurs livres de poche toujours aux contours érotiques. Il m'a demandé si j'avais des scrupules à essayer de travailler de cette manière, j'ai tout de suite accepté et, après une brève période d'apprentissage, je suis devenu le concepteur de «Casinella», toujours conçu par Leonetti, et dans plusieurs épisodes d'autres séries.
Ce fut une période inoubliable, je me sentais comme la mascotte d'un formidable groupe de professionnels, des personnes incroyables qui ont réussi à créer cette harmonie de provocation, de camaraderie, de non-conformité face au travail que seul le véritable esprit des Romains peut apprécier. Un travail qui grandit de plus en plus et qui nous a vus comme les premiers contributeurs aux éditions Cioè, de Piscopo, destinées à un public adolescent, jusqu'à atteindre le point de publier pour Nuovo Intrepido, dirigé par Carlo Pedrocchi, où, avec un scénario de Peppe de Nardo, avec Billiteri, a commencé à expérimenter de nouvelles couleurs et de nouvelles formes de langage visuel. Entre-temps, j'ai déménagé à la campagne, mais j'ai continué à collaborer avec mon cher maître Dino.
Ce cheminement permettra à Vannini d'atteindre une série qui a marqué une époque, comme Ken Parker, et de travailler avec deux monstres sacrés comme Giancarlo Berardi et Ivo Milazzo. Bien qu'il n'ait dessiné que les 56 premières pages de la dernière aventure de la série (Faccia di Rame), cette courte participation ne l'empêchera pas d'être, avec Ivo Milazzo, l'un des auteurs qui a le mieux profité du succès de Ken Parker, à savoir en réalisant de nombreuses illustrations pour des galeries privées qui sont aujourd'hui, justement très recherchées pour leurs qualités.
Comment est venue l'opportunité de travailler sur Ken Parker et quelles ont été les principales difficultés ?
Luca Vannini : Je me souviens que Milazzo m'a appelé pour me demander si je serais intéressé à collaborer avec eux. Ne réfléchissez pas à deux fois. J'ai surtout lutté contre mon insécurité, mon autocritique exagérée, qui ont beaucoup ralenti le travail, mais en ce qui concerne le style d'Ivo Milazzo, j'ai pu étudier la fraîcheur du trait et, en ce qui concerne le cadrage , il suffisait de se fier aux descriptions très détaillées de Giancarlo Berardi, avec un fort sentiment d'accomplissement. À la réflexion, j'aurais pu faire un meilleur usage de cette expérience.
Dans Ken Parker, Vannini tente d'approcher le style de Milazzo, laissant les critiques de l'époque surpris, devinant immédiatement l'énorme potentiel de l'auteur. Depuis, l'auteur a prouvé avec un style plus personnel, que l'auteur assume être « en évolution continue, je l'espère » et non définitif.
Alors, comment l'opportunité Tex Willer s'est-elle présentée ?
Luca Vannini : Vincenzo Marano, qui s'est occupé pendant de nombreuses années de la vente de mes illustrations, m'a proposé de rendre hommage à Tex, car les innombrables illustrations de Ken Parker risquaient de gonfler le marché. J'ai accepté, mais je dois avouer que mon premier Tex oscillait entre l'obscène et le ridicule. Petit à petit, j'ai abandonné l'idée de réinterpréter le Tex de Villa, j'ai étudié Ticci, Font, Fusco et le vieux Nicolò. Jusqu'à ce que, avec l'insistance de Maurizio Di Vincenzo, ami et collègue depuis 30 ans, je trouve le courage de demander à Boselli si je pouvais passer un examen pour rejoindre les rangs des designers officiels de Tex. Voila !
Autrement dit, avec Ken Parker et maintenant Tex Willer, vous avez déjà eu l'occasion de travailler sur deux séries mythiques. Cependant, bien qu'ils évoluent dans les mêmes environnements, Tex et Ken Parker sont des personnages différents.
Luca Vannini : Leurs codes moraux ne sont pas en conflit, ils ont tous les deux un fort équilibre intérieur. Tex a un grand sens du devoir, Ken Parker de ce qui est juste. Dans Tex, les personnages sont concrets, les gentils sont bons et les méchants sont méchants. Chez le ranger, il y a un sens de la camaraderie, du respect, de l'amitié, une volonté de maintenir la légalité, un caractère bien défini dans une période particulièrement violente de l'histoire occidentale. L'usage de la force fait partie intégrante de la vie de Tex. Il a des objectifs bien définis. Ken Parker est un personnage typique des romans d'aventure de la fin du 19e et du début du 20e siècle. Il aurait pu naître du stylo de Fenimore Cooper de Jack London. Son itinéraire romantique va de pair avec son parcours rétrospectif, presque mélancolique, il est mêlé à des aventures où il est souvent confronté à la terrible condition de se remettre en question de ce qu'il vaut vraiment. Des situations dont il ne se départit jamais. Un petit Heart of Darkness (Joseph Conrad) et un petit Ismaël dans Moby Dick d'Herman Melville. Il ouvre et ferme l'aventure seul. Un beau personnage idéalisé par un autre mythe de la bande dessinée italienne : Berardi.
Et qu'est-ce que le Tex pour vous, comment le définissez-vous ?
Luca Vannini : Laissez-moi vous raconter une histoire, un beau souvenir auquel je ne me lasse pas de me référer. Mon père avait une boulangerie, et quand il fermait le magasin à l'heure du déjeuner, je rentrais à la maison, mangeais et m'allongeais avec lui dans son lit pour une sieste. Eh bien, un après-midi, je me suis réveillé alors que mon père était déjà retourné au travail. Sur la table de chevet, j'ai trouvé, dessiné sur l'une des feuilles que mon père utilisait pour noter les commandes des clients, un beau Tex. Voilà, pour moi Tex c'est aussi ce souvenir magique de mon père qui, s'il était encore en vie, m'aurait volontiers aidé. Il aimait dessiner, mais son travail était très différent. Tex est la transmission continue d'une légende à travers les générations.
Que signifie pour vous dessiner cette légende qu'est Tex Willer ?
Luca Vannini : Serait-il trop évident de dire que c'est un grand honneur ? Alors je cite je ne sais pas qui a dit « Un personnage fantastique qui a été sous le feu des projecteurs pendant des décennies, il a sûrement pris vie maintenant ». Je suis complètement d'accord. Quelque part dans un monde parallèle, Tex et ses pards campent maintenant en train de manger de la viande séchée et des haricots. Je suis sur et certain.
Avez-vous été inspiré par un auteur Tex ?
Luca Vannini : Certainement Ticci. Équilibre, poids, dynamisme, fraîcheur.
Quelles sont les principales caractéristiques et difficultés d'une série comme Tex ?
Luca Vannini : Aucune de pertinence particulière, à part celles que j'ai mentionnées. A propos des difficultés d'élaboration j'étudie, comme je l'avais fait avec «Julia», les mouvements possibles, la façon de marcher, les expressions, les postures qui peuvent mettre encore plus en valeur le caractère d'un personnage. Mais le tout avec modération et équilibre.
Tex Willer
Chindi (il a fait le dessin et les couleurs) 32 pages (1 histoire sur les 4 de ce TexColor)
Première publication : Tex Color # 8 - Minaccia nelle tenebre e altre storie, Sergio Bonelli Editore (Novembre 2015)
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A noter qu'il s'est embrouillé avec le scénariste Boselli mais serait content de refaire un Tex. Cependant il est gravement malade depuis plus d'un an.
C'est un artiste peintre. Il m'a envoyé les étapes de la peinture qu'il a réalisé pour moi et sans passage au crayon il est capable de peindre, dans un coin du tableau, des tipis sur quelques centimètres comme le montre la photo que j'ai prise :
- Vannini 06 les tipis dimensions.jpg (7.04 Kio) Vu 459 fois
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Il travaille à l'aquarelle mais aussi à l'acrylique et aussi à l'huile.
Si certains sont intéressés j'ai les tarifs.
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- Luca Vannini01.jpg (20.31 Kio) Vu 459 fois
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