Les éditions Gerfaut (1957-1985)

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pak
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Les éditions Gerfaut (1957-1985)

Message par pak »

En attendant un article sur cette maison d'édition, voici un petit clin d’œil vers cet éditeur qui fut l'un des leaders d'édition de romans populaires dans les années 1960 et 1970, principalement dans le roman de guerre.

En fait, c'est en regardant hier soir le film C'est pas parce qu'on a rien à dire qu'il faut fermer sa gueule ! que j'ai eu l'idée de ce message.

En cette période de pandémie qui nous cloître à la maison, nous privant de salles de cinéma, et en plus pas tellement intéressé par ces films de super-héros américains qui se lattent la tronche à coups d'immeubles, je me replonge dans le cinéma dit populaire français des années 1970 à 80, revoyant ces films un peu oubliés grâce au cinéma à la demande des chaines thématiques. Oubliés, mais pas totalement, puisque le film que j'ai visionné hier soir, C'est pas parce qu'on a rien à dire qu'il faut fermer sa gueule ! donc, titre à la / ou en hommage à Michel Audiard (qui n'a pas participé au film), avait rassemblé un peu plus de 800 000 spectateurs lors de sa diffusion sur la chaine C8 le mardi 2 juin 2020 à 21H15, soit presqu'autant que les 974 344 entrées France lors de la sortie du film le 22/01/1975.

Sympathique comédie dont le scénario avait été initié par le trio Christian Clavier, Gérard Jugnot et Thierry Lhermitte, pas encore adoubés par le succès des Bronzés. D'ailleurs de leur scénario ne reste quasi que l'idée centrale, celle d'un casse d'un coffre de la SNCF via les toilettes publiques de la gare de l'Est, puisque le scénario a été entièrement revu par le réalisateur du film, Jacques Besnard (Le Grand restaurant, Le Fou du labo 4, Le Jour de gloire... pour situer l'humour du bonhomme) et le fameux scénariste Jean Halain, vétéran du cinéma franchouillard, afin d'adapter l'histoire au trio vedette du film, d'une autre génération que les trublions du Splendid, à savoir les inimitables Bernard Blier, Michel Serrault et Jean Lefebvre ! Cela n'empêchera pas Clavier et Jugnot de faire des apparitions dans le film. Si celles de Jugnot, avec son running gag d'employé de gare qui a un soucis d'incontinence sont anecdotiques, l'unique et courte de Clavier en flic de quartier faisant des avances dans les toilettes à Blier vaut son pesant de cacahuètes !

On aperçoit d'ailleurs sur la capture ci-dessous Bernard Blier dans son œuvre :

Cestpas_parce1.jpg

Mais ce qui m'amène ici n'est pas le talent de l'acteur, mais plutôt ce qu'on aperçoit dans la vitrine de la librairie à droite et qui m'a tapé dans l’œil à la vision du film. Si on zoome, on peut voir ceci :

Cestpas_parce2bis.jpg

Oui, sur la rangée du haut, on voit nettement les couvertures des trois premiers numéros de la collection "Super Hors Série" des éditions Gerfaut (les cochonnesques) : Fraulein SS, Les Prêtresses de la croix gammée (1972), et Filles à soldats (1973), tous trois signés Kurt Gerwitz (pseudonyme de Jean-Hubert Guffens). Scène tournée dans la gare de l'Est, en août 1974 (le tournage du film s'étant étalé entre le 19/08 et le 04/10/1974, les scènes dans la gare filmées en août).

Cestpas_parce4.jpg
Cestpas_parce5bis.jpg


Où l'on peut dire que c'est une illustration parfaite de la notion du roman de gare. Cela me renvoie d'ailleurs à certains souvenirs, quand je prenais le métro pour aller à la gare Montparnasse certains samedis vers 1985, trouvant dans ces librairies de gare les derniers numéros Gerfaut parus (pas ceux montrés ici, l'éditeur ayant stoppé cette variante après 11 titres parus), et ce même quelques mois après l'arrêt définitif de son activité.

Une remarque quand même : pas certain que ces couvertures seraient de nos jours acceptables dans une vitrine, même de gare. On peut voir pendant la scène une figurante avec une petite fille examiner longuement la vitrine et donc regarder ces illustrations un peu sulfureuses. En cette époque où offuscation et levée de bouclier pour un rien sont devenues la norme, on est presque surpris de voir cela à l'écran.


C'est pour cela que j'aime (re)voir des films français de cette période, quand leurs scénarios sont des histoires contemporaines, car quels que soient leurs qualités ou défauts, grands ou petits films, ce sont des témoins temporels de leur époque (c'est vrai pour toutes les décennies du cinéma, mais les années 1970-80 me parlent plus puisque j'y ai grandi).


Un reportage daté du 24/08/1974 sur le tournage du film à la gare de l'Est, mis en ligne par l'INA, où l'on se rend compte que le trio vedette ne prend pas le film très au sérieux, et il ne s'en cache pas vraiment, loin des interviews très consensuelles et / ou un brin coincées qu'on voit régulièrement à la télévision.

Modifié en dernier par pak le ven. 05 févr. 2021, 13:28, modifié 3 fois.
Il m'apparaît de plus en plus clairement que les motifs ténébreux de cette obscurité s'enrobent d'un mystère opaque assez peu propice aux interprétations lumineuses... Achille Talon

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Gradatio
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Re: Les éditions Gerfaut (1957-1985)

Message par Gradatio »

Merci beaucoup Pak pour ce regard aiguisé et l'analyse.

C'est vraiment très interressant :pouce:
Tu n'es plus là où tu étais mais tu es partout là où je suis.
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pak
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Re: Les éditions Gerfaut (1957-1985)

Message par pak »

Concernant Gerfaut, 620, c'est le nombre de romans publiés dans le genre guerre. J'ai fait une étude sur cet éditeur, et pour le genre on a :

- 570 format poche simple, la collection principale (dont 17 rééditions des premiers parus),
- 91 hors-série grand format à jaquette,
- 7 hors-série grand format broché sans jaquette,
- 11 super hors-série grand format broché (couvertures sur fond blanc),
- 41 dits doubles format poche (dont 35 rééditions issues des hors-série grand format à jaquette et super hors-série grand format broché).

Soit 620 romans de guerre publiés, dont 52 rééditions.

À ceux-ci il faut ajouter :

- 18 romans cape et épée (17 au format poche et 1 hors-série à jaquette format similaire à la collection guerre),
- 8 romans de la première série d'espionnage, "Chut espionnage", format poche,
- 6 romans de la seconde série d''espionnage (qui commence curieusement au n° 101), format poche,
- 30 romans de la troisième série d'espionnage dite "Sélection Espionnage", format poche,
- 6 romans érotiques de la collection "L'Eau à la Bouche",
- 1 roman policier de la collection "Brigade de recherches" stoppée dès ce numéro, format poche,
- 1 roman policier paru hors collection (Le Crime de la rue Caulaincourt), format poche,
- 1 roman hors collection grand format broché intitulé Adios Gauchos.

À noter qu'à ses débuts (difficiles à situer), l'éditeur a fait paraitre une poignée de romans/essais (dont un livre d'un certain César Pulvar, grand-père de... ), ainsi qu'une série de 6 livres pour enfant.

Dans les années 1960, l'éditeur a aussi proposé une poignée de livres torchés dans l'urgence pour rebondir sur l'actualité et vendre du papier, précisément au lendemain du décès d’Édith Piaf, puis de l'assassinat de Kennedy, et plus tard lors de l'écrasement de l'insurrection du Printemps de Prague... En 1969 paraît aussi une étude historique en deux volumes sur La Commune par un historien assez sulfureux à l'époque, le même qui pondra une étude sur le nazisme qui sera intégrée dans la collection de guerre en poche de l'éditeur en 1984.

Au total, l'éditeur, qui disparaît en 1985 et qui est tombé dans l'oubli malgré 28 années d'existence, aura proposé au moins 708 livres tous formats et collections confondus. La grosse majorité des titres étant issue des romans de guerre, écrits pour la plupart par des français et un espagnol sous divers pseudonymes à consonances allemandes, russes et anglo-saxonnes.
Il m'apparaît de plus en plus clairement que les motifs ténébreux de cette obscurité s'enrobent d'un mystère opaque assez peu propice aux interprétations lumineuses... Achille Talon

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Fin Fang Foom
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Re: Les éditions Gerfaut (1957-1985)

Message par Fin Fang Foom »

Merci de ces infos concernant l'éditeur Gerfaut.
Est-ce que les noms des auteurs français derrière les consonances étrangères on été divulgués ? Est-ce que ces auteurs ont travaillé chez d'autres éditeurs comme Fleuve Noir par exemple ?
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pak
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Re: Les éditions Gerfaut (1957-1985)

Message par pak »

Oui, la majorité est identifiée. En fait, concernant les romans de guerre, si plus de 600 romans ont été publiés par Gerfaut, les auteurs se cachant derrière leurs pseudonymes étaient moins d'une vingtaine...

Par contre la difficulté c'est d'attribuer les pseudonymes à leur auteur. Et comme ce ne sont pas des auteurs de littérature classique, il est compliqué de trouver des informations les concernant pour écrire une bio, même courte. Pourtant certains étaient des vétérans de la littérature populaire depuis les années 1950 dans tous les genres, du policier à l'espionnage en passant par l'érotique (Georges Rocques ou André Favières par exemple).

Et oui, il y a eu des passerelles entre Fleuve Noir et Gerfaut, quand le premier a stoppé sa collection de romans de guerre FEU en 1975 (Roger Maury, Baudouin Chailley).

On a aussi des auteurs ayant écrit pour la courte série de romans de guerre Baroud chez L'Arabesque, qui vont aller chez Gerfaut quand l'éditeur stoppe ses activités (Robert Vaudois, Hubert Génin).


L'auteur le plus connu ayant œuvré pour la collection de romans de guerre Gerfaut est Baudouin Chailley, qui a longtemps écrit pour la collection Anticipation de Fleuve Noir (Piet Legay entre autres, c'est lui), et encore très récemment chez Rivière Blanche (en 2022 est paru La Révolte Shangars).
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Fin Fang Foom
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Re: Les éditions Gerfaut (1957-1985)

Message par Fin Fang Foom »

Merci pour toutes ces infos.
yannlemalin
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Re: Les éditions Gerfaut (1957-1985)

Message par yannlemalin »

Merci , pour toute ces info.
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